mercredi 29 mai 2013

Tout ce que l'on a jamais voulu vous dire explicitement sur les semences !

Comme moi, vous avez du remarquer ces derniers temps une "légère" agitation dans les médias et les réseaux sociaux autour de l'évolution de la réglementation sur les semences.
Comme d'habitude, on crie au scandale, on dénonce, on s'insurge et on diffuse et rediffuse à volonté un argumentaire bien rodé (pratiquement au mot près) sur les blogs et réseaux sociaux !

En voici quelques extraits choisis








La presse ne reste pas muette non plus, et comme morceaux choisis je retiendrai deux articles du Monde (vous remarquerez en comparant les idées véhiculées par les deux articles une légère schizophrénie au passage)
Bruxelles veut simplifier la commercialisation des semences 
Bruxelles renforce la mainmise des grands groupes sur la commercialisation des semences agricoles

Que retenir de tout ce tapage ?

Tout est mis en œuvre pour capter l'attention du grand public, pour qu'il prenne peur, s'insurge ou s'indigne.
Les habiles rédacteurs ont utilisé des phrases simples, bien tournées, et ont surtout pris soin de savamment distiller dans leurs propos les termes génériques percutants et anxiogènes tels que :
  • industriel / industrie agrochimique
  • OGM / Monsanto
  • Brevet / COV
  • Pesticides / Produits chimiques
  • Atteinte à la biodiversité

Vous l'aurez bien deviné à travers leurs propos, ils combattent un règlement censé favoriser ce qui représente "le mal en personne" à leurs yeux, l'industrie de la semence, l'accusant de tous les maux possibles et imaginables, jusqu'à imaginer une théorie du complot avec Monsanto en embuscade ..

Qu'en est il réellement ?

Je vous invite à aller directement à la source de l'information, avant qu'elle ne soit déformée et dénaturée.
Pour une fois que nos amis de la commission européenne rédigent un document compréhensible, on aurait tort de se priver : le communiqué de presse de la commission européenne

Les jardiniers amateurs et les semences anciennes :

Je ne vais pas vous faire une relecture exhaustive du document, mais je vais juste insister sur quelques points, au cas où vous ne liriez pas le document jusqu'à la fin !!
D'ailleurs, il faudrait même commencer par lire les points 9 et 10 tellement ils rendent ridicule l'échantillon de réactions virulentes infondées et dogmatiques sur twitter et dans les médias "alternatifs" cité ci dessus !

Allez, pour le plaisir :
"Le matériel de reproduction des végétaux destiné à la conservation dans l’exploitation ou échangé en nature entre conservateurs de semences est exclu du champ d’application du règlement. Cette dérogation vise à promouvoir la conservation des semences traditionnelles."
"L’utilisation de semences dans les jardins privés n’est pas réglementée par la législation de l’UE."
"La réforme clarifie la situation: tout non-professionnel (jardinier amateur, par exemple) pourra procéder à des échanges de semences avec d’autres particuliers sans être concerné par les dispositions du règlement proposé." 

La brevetabilité du vivant, les OGM, la "taxe sur les semences de ferme" ...

Le principe que j'ai exposé dans le billet précédent trouve une bonne partie de son sens dans les sornettes que l'on peut lire ici ou là ..

En Europe les semences sont protégées par des certificats d'obtention végétale ( COV ) et non des brevets, "petite" nuance que les "rédacteurs" et relayeurs du "scandale" n'ont pas dû bien saisir ( un passage chez un ophtalmo un orthophoniste et un psy sont vivement conseillés )...
Toutes les conneries ( je n'ai malheureusement pas trouvé de mot plus fort ) que l'on peut lire font référence aux brevets et dérapent inexorablement sur Monsanto, les OGM, et arrivent même à citer le gêne Terminator qui n'a jamais été utilisé sur des semences commerciales !!!



Donc, avec les COV, nous avons le droit, pour 21 espèces, de ressemer notre récolte, sous certaines conditions !!
Vous allez me dire, pas librement, il faut payer une taxe !! Taxe destinée au financement de la recherche.
C'est scandaleux ? Pas spécialement quand on sait exactement ce que sont les semences de ferme ( tout du moins une bonne partie), et surtout leurs origines et comment elles sont produites.

Le début de cet article est justement intéressant !
"Je n'achète que l'équivalent de 5 à 6 hectares de semences de blé chaque année. Le reste, ce sont mes propres semences, explique-t-il. Cela me coûte moins cher et elles sont de meilleure qualité."

Pourquoi achète t'il encore des semences certifiées alors ? Tout simplement pour renouveler ses variétés, les reproduire et en faire des semences de ferme. On achète la dernière nouveauté et on la multiplie soi même, profitant des dernières avancées de nos sélectionneurs pour pas cher et surtout sans rémunérer la recherche ...
Cette taxe, qui est prélevée sur les quantités produites, permet donc de rémunérer les sélectionneurs à juste titre.
Je vais même faire un parallèle avec la taxe "copie privée" que vous payez quand vous achetez un support de stockage numérique, pour financer la création ! 
Elle ne vous donne pas pour autant l'absolution et le droit de pirater et de copier le dernier titre de Christophe Maé ou de Zaz ( C'est juste un exemple !!)
Et si par honnêteté, sur un malentendu ou une faiblesse, vous veniez à miraculeusement acquérir légalement ce titre, cette taxe sur les supports reste perçue, on ne vous rembourse rien !
Pour ce qui est des semences, c'est bien plus intelligent, et si vous achetez des semences dites certifiées, on vous rembourse une partie de cette taxe !! Scandaleux n'est ce pas ? ;-) 

Pour conclure

Le fondement de ces règles, et c'est écrit noir sur blanc, est une volonté de traçabilité et de sécurité sanitaire et alimentaire : "Le principal objectif de la révision est d’apporter aux utilisateurs, et en particulier aux agriculteurs, toutes les garanties nécessaires concernant la santé, l’identité et la qualité du matériel de reproduction des végétaux (qui comprend les semences et le matériel de multiplication des végétaux)." Elles garantissent également aux paysans l’accès aux semences et le droit de les reproduire sous certaines conditions, sans tomber dans les dérives de la brevetabilité du vivant, tout en pérennisant la recherche variétale ! Et là je vais me faire l'avocat du diable en avançant le fait que nous sommes en présence d'un phénomène d'arroseur arrosé. Ce sont les mêmes qui ont hurlé ( et j'ai les noms ) pour que les OGM soient évalués comme des pesticides, qui ont réclamé une filière sans OGM, qui s'indignent parce que la tolérance de 0,9% d'OGM est trop élevé; qui dénoncent un règlement qui est en partie une conséquence de leurs revendications ( exigences de traçabilité, etc .. )

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